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Frédéric Sojcher au Ciné Patria de Virton

Présent ce mardi 25 avril au Patria de Virton pour l’avant-première de son film « Le Cours de la Vie » avec Agnès Jaoui, Jonathan Zaccaï et Géraldine Nakache, le réalisateur Frédéric Sojcher a accepté de répondre à nos questions avant de rencontrer le public. Thibaut Demeyer.

Frédéric Sojcher, réalisateur de « Le cours de la vie » – (c) Thibaut Demeyer

« Le cours de la vie » est un film qui s’adresse à un large public même si, de prime à bord, on pourrait croire qu’il s’adresse principalement aux amoureux du cinéma.

Effectivement. Mon souhait, c’est que les spectateurs qui ne sont pas cinéphiles, puissent entrer dans l’histoire. J’ai eu le bonheur de faire des avants premières et d’avoir des spectateurs qui ne vont pas régulièrement au cinéma. Ils ont tous été touchés par l’axe émotionnel du film parce qu’il n’y a pas qu’une histoire d’amour. Il y a aussi le deuil, la mélancolie du temps qui passe mais aussi des moments de comédie. C’est donc cet axe émotionnel qui, à mon avis, peut toucher aussi bien les spectateurs qui sont passionnés de cinéma que le spectateur lambda qui va au cinéma de temps en temps et qui n’a pas toutes les références liées à l’histoire du cinéma. Mon rêve de cinéaste, c’est de pouvoir parler à toutes et tous.

Le film a cette particularité d’avoir différents formats de prises de vue, à savoir le format « carré » et le « scope ». Pourquoi ce choix ?

Il y a plusieurs interprétations. Tout d’abord, montrer l’émotion et pour moi, l’émotion au cinéma c’est le scope. En revanche, lorsque l’on est dans le cours de Noémie (alias Agnès Jaoui), on est dans le format « carré ». On passe donc d’un format à l’autre, ce qui donne un rythme visuelqui fait que nous ne sommes pas dans une captation habituelle. Ce n’est pas comme une master class filmée quand on avait la captation. Ensuite, je pense que par la mise en scène, on peut aussi, par exemple, comprendre qu’il y a un sous-texte, comprendre qu’il y a des échanges de regards. Mais là, on rentre plus dans un débat de spécialistes car le spectateur lambda ne percevra pas pourquoi on filme de telle ou telle manière. Pour moi, le véritable enjeu est de ne jamais ennuyer le spectateur, que l’histoire aille crescendo au fur et à mesure qu’avance la journée puisque qu’elle se déroule sur une journée.

C’est la première fois que vous réalisez sur base d’une histoire dont vous n’êtes pas le scénariste. Comment s’est passée votre rencontre avec Alain Layrac et qu’est-ce qui vous a donné envie de tourner cette histoire ?

Tout dépend de ce que l’on appelle scénariste. Par exemple, c’est moi qui ai eu l’idée du film et puis, après, j’ai accompagné Alain Layrac sur les différentes étapes d’écriture. Chaque fois, je donnais mon avis sur l’écriture et mes envies. Il en tenait compte mais je n’étais pas devant l’écran de l’ordinateur. Donc, concrètement, ce n’est pas moi qui ai écrit le scénario. Je trouve alors très juste qu’il soit le seul crédité comme scénariste.

Par ailleurs, une partie de l’histoire se tourne, et c’est le cas pour tous les films ou presque, au tournage. Si on prend le cas du « Cours de la vie », il y a environ 20% du film qui n’a pas été écrit sur le scénario et qui a été tourné sous forme d’improvisation ou décidé en cours de tournage. Et enfin, et c’est le grand classique, il y a une partie qui s’écrit au montage puisqu’au montage, on va décider de supprimer certaines scènes que l’on a tournées et qui ne trouvent pas leur place pour différentes raisons. Puis, quatrième étape, essentielle pour raconter une histoire, c’est la musique car elle raconte aussi une histoire, souvent émotionnellement, parfois aussi dans les films d’horreur ou à suspens parce qu’on sait bien que la musique sait jouer sur le suspens que vivra ou pas le spectateur. On change la musique du film et on n’aura pas le même film, même en gardant le même montage, les mêmes acteurs, le même scénario. Ce sont donc tous ces éléments mis ensemble : scénario, tournage, montage, musique qui raconte l’histoire. Je suis le premier à rendre hommage au scénariste et au scénario mais mal joué, mal mis en scène ou mal monté avec une mauvaise musique, cela ne peut pas donner un bon film.

Pour « Le Cours de la vie », la genèse est particulière. J’ai revu mon vieil ami Alain Layrac lors de funérailles. Il m’a alors expliqué qu’il venait de terminer un texte sur son métier de scénariste et qu’il n’avait pas encore d’éditeur. Je lui ai demandé pour le lire et je suis tombé amoureux de ce texte. C’est un livre qui parlait de lui, de son parcours et comment en tant que scénariste on est inspiré par les évènements de nos vies et en fonction de ce qu’on vit, cela va influencer l’écriture scénaristique. C’était une démarche originale qui m’a beaucoup plu. C’est là que j’ai eu une idée lumineuse « Et si, on l’adaptait au cinéma ». La réaction d’Alain Layrac a été de me dire « tu es fou, on ne peut pas adapter un livre sur un scénariste qui parle de la pratique d’un scénario. Ce n’est pas un film de cinéma, de fiction. » Je lui ai alors répondu que si, et c’est là que l’on a rajouté toute cette histoire d’amour entre Agnès Jaoui et Jonathan Zaccaï et tous les personnages secondaires.

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Et si Agnès Jaoui n’avait pas accepté le rôle ?

Le film ne se serait pas fait ! Bien sûr, je ne peux pas répondre de manière catégorique mais c’est en tout cas une conviction.

Est-ce que vous lui avez donné la possibilité d’improviser lors de sa master class et ainsi profiter de son expérience de scénariste ?

Pour tout ce qui touche à la partie du cours donné aux étudiants, il y a trois étapes d’écriture. Celle qui est l’adaptation du livre d’Alain Layrac, qui représente la majeure partie de ce qu’elle dit. Ensuite, Agnès Jaoui s’est mise autour de la table pour donner ses propositions de réécriture car elle-même scénariste, il fallait qu’elle soit aussi crédible et non en contradiction avec ce qu’elle pense en tant que scénariste. Troisième étape, au tournage où les choses ont encore bougé avec d’autres propositions faites par Agnès Jaoui comme « cette phrase là je ne la sens pas, est-ce que je peux la dire autrement ? ». Tout cela n’apparaissait pas dans le scénario, c’est au tournage que cela s’est fait. Puis, dernier élément, parfois j’adore improviser durant le tournage. Attention, il s’agit d’improvisation dirigée et non totale car cela se base sur le scénario et que l’on sait de manière globale ce que l’on veut raconter. Donc, j’ai demandé à Agnès Jaoui si elle était d’accord pour qu’un acteur, jouant un étudiant, intervienne pour la perturber dans son cours sans pour autant lui révéler ce qu’il allait dire pour qu’elle soit au « tac au tac » dans l’improvisation et dès lors réagir en fonction de ce qu’il dirait. Ce à quoi elle a répondu oui.  

Comment avez-vous travaillé avec Vladimir Cosma sur la musique ?

C’est un grand privilège pour moi de pouvoir travailler avec Vladimir Cosma. C’est d’ailleurs notre quatrième collaboration. Il a d’abord lu le scénario car la musique a été écrite en plusieurs étapes. Une partie avant le tournage. Puis, une idée que j’ai eue et qui n’était pas dans le scénario, c’est qu’à chaque fois qu’Agnès Jaoui proposait un extrait de film lors de son cours, on restait sur les étudiants pendant l’extrait sans jamais le film. Et donc, par la musique, on imagine ce qu’est le film. C’est une idée que Vladimir a beaucoup appréciée parce que c’était la première fois qu’on lui demandait cela. Et puis, grâce à la complicité que nous avons, Vladimir a accepté d’ouvrir tout son catalogue de musique de films, tout en gardant les droits sur toutes ses musiques, ce qui me permettait d’aller chercher, après qu’il ait donné son aval, une musique dans ses précédents films pour les mettre dans le mien. Bien sûr, il y a aussi la musique originale et la chanson qui ont été spécialement créées pour « Le Cours de la vie ».

Votre film est né dans la souffrance et a fini par voir le jour grâce à un financement français. Comment expliquer cela alors que vous êtes belge ?

Le film a failli ne pas se faire. J’aurais aimé, comme pour tous mes films, qu’il y ait une co-production avec la Belgique mais le projet a été refusé à trois reprises par la commission du film en Belgique. Il se fait que je n’ai plus réalisé de fiction depuis « Hitler à Hollywood » en 2011. En douze ans, j’ai remis plusieurs projets à la commission du film et ils ont tous été refusés. Cela représente 15 projets successifs en ce compris des aides au scénario. Même pour mon documentaire « Je veux être une actrice » j’ai essuyé un refus en ce compris celui de l’aide à la finition dont le montant n’est pas excessif. Je me suis alors posé la question pourquoi autant de refus ? La réponse qui m’a été donnée est que je ne suis pas le seul. Il est vrai qu’il y a un très grand nombre de cinéastes qui sont dans le même cas que moi. Il y a des dizaines de cinéastes belges, hommes et femmes, dont certains ont été sélectionnés dans de grands festivals et dont les projets sont refusés parce qu’il n’y a pas de places pour tout le monde. C’est aussi une question d’ordre politique. Comment peut-on accepter que de l’argent public qui soit donné pour faire des films et puis que 90% des cinéastes qui ont eu cette chance, après, on les laisse de côté ne leur donnant plus les moyens de monter leur nouveau projet ? Mais le problème n’est pas propre à la Belgique, en France c’est la même chose. Je n’ai pas eu une aide d’avance sur recette du CNC mais bien une aide de la région d’Occitanie, une aide de Toulouse où j’ai tourné, une aide de distributeurs, de producteurs privés et c’est comme cela que j’ai pu tourner mon film. En Belgique, c’est quasiment impossible. Voilà un avantage de la France par rapport à la Belgique parce qu’il n’y a qu’une seule source de financement qui détermine si on peut faire le film ou pas.

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