DOMINIK MOLL REVIENT EN COMPETITION
Après « La Nuit du 12 » présenté à Un Certain Regard en 2023, Dominique Moll retrouve la compétition avec « Dossier 137 ». Une fiction inspirée de faits réels qui a suscité beaucoup de réactions. A Cannes, Brigitte Lepage.
Le dossier 137 est en apparence une affaire de plus pour Stéphanie, enquêtrice à l’IGPN, la police des polices. Une manifestation tendue, un jeune homme blessé par un tir de LBD, des circonstances à éclaircir pour établir une responsabilité. Mais un élément inattendu va troubler Stéphanie, pour qui le dossier 137 devient autre chose qu’un simple numéro.
Après tout un travail de recherches, documentation, et une collaboration de plus de 40 ans avec son binôme/co-scénariste Gilles Marchand, Dominik Moll, en compétition avec « Dossier 137 », signe un film dérangeant, basé sur des faits réels, et mettant en avant le rôle d’une enquêtrice de l’IGPN incarnée par Léa Drucker. Une histoire de tir des forces de l’ordre ayant blessé un jeune homme lors des manifestations des gilets jaunes en 2018 est mise en avant, sur le fil étroit de la compassion et du parti pris s’il en est, qui pourrait se briser rapidement sans crier gare car on ne peut dire, en fait, de quel côté se projeter.
Le réalisateur Dominik Moll,aime à dire que tout est une question de point de vue, multiple ou quasi unique précisant que « l’écriture du scénario, puis le découpage, la façon de voir la mise en scène, de filmer les choses que l’on veut exprimer et comment les monter » est primordial. Se référant d’ailleurs, à des échanges de conversations entre Hitchcock et Truffaut.
Des questions restées sans réponses
« Dossier 137 » pourrait être considéré comme la continuité de « La nuit du 12 » mais uniquement sur la forme et le fond. Il s’agit ici plutôt de dénoncer une pratique peu orthodoxe des forces de l’ordre, en 2018, face aux mouvements des gilets jaunes. En D mauvaise fois dans certaines situations, et pas des moindres, surtout lorsque l’on aborde des cas de blessures, certaines graves, mais surtout tout à fait « gratuites ». Mauvaises foi d’officiers au bout de la crise de nerfs due à la fatigue, du manque d’information sans réels ordres de mission, car leur seul règle à suivre est « il faut protéger la Nation ?». Sans compter un autre leitmotiv auquel il ne faut pas céder : « « Pourquoi les gens n’aiment pas la police ? »
Même si Dominik Moll utilise un langage tout à fait nuancé, il parvient à nous interpeller pour nous mettre face à notre prise de position.Il faut bien admettre que, devant certains faits, l’empathie peut nous jouer des tours… mais de quel côté ? Y a-t-il une vraie justice ou doit-on se contenter des vices de procédure pour suivre, même si nous n’en avons pas envie, les décisions prises dans le chef des hautes sphères des différentes directions ? Même face à des évidences accablantes, devons-nous tout accepter ? La loi est ainsi faite que, vice de procédure évidente, ou pas, le choix est inéluctable et c’est bien ce qu’a voulu démontrer Dominik Moll dans ce film où le doute va persister jusqu’au bout et où les questions resteront sans réponses… et les victimes en attente de leur sort, quel qu’il soit. Faire confiance ou pas dans la justice, la question a bien été posée en conférence de presse et cela a clos un débat constructif et bien animé.
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